Pim00 - le blog d’en face

21 April 2005

La couleur remue des sentiments

Pourquoi la couleur au cinéma. Dans le cours vous nous donnez sept raisons d’utiliser la couleur au cinéma : tout d’abord nous avons la moins intéressante de toutes, utiliser la couleur pour reproduire plus fidèlement la réalité. Ensuite on utilise la couleur pour faciliter la lecture de l’image en variant les tons. Après on pourrait constituer une signalétique des couleurs pour clarifier la narration, on l’utilise pour donner un cadre de référence à une époque, à un lieu, à un courant artistique, on l’utilise pour ces expressions métaphoriques ou symbolique, mais aussi parce qu’elle participe à un projet esthétique d’ensemble et enfin la septième raison, que je vais développer au cours de cette dissertation, l’utilisation de la couleur pour ses capacités a produire des stimuli émotionnels. Je définirais, dans un premier temps, la couleur en tant que vus de l’esprit. On s’intéressera par la suite à son rôle et enfin nous joindrons deux exemples du cinéma (pas de printemps pour Marnie d’Alfred Hitchcock et Bleu de Krzysztof Kieslowski) afin de découvrir l’ampleur de la couleur dans ces films.

Avant de définir la couleur, commençons par définir ce qu’est la lumière. Alors d’après le cours de Jean Berthomé, la lumière est constituée d’ondes électromagnétiques lumineuses diffusées par une source d’énergie comme le soleil, la flamme d’une bougie, le filament incandescent d’une ampoule…etc.

Mais, au fait, l’Å“il voit-il la lumière ou ne voit-il que sa réflexion sur un écran ou sur une image?

En effet l’Å“il humain ne voit que le reflet de la lumière sur un objet. Si nous prenons l’exemple du faisceau lumineux d’une source d’énergie, dans l’obscurité celui-ci sera visible uniquement par la présence de poussières ou de fumés en suspension.

Le cerveau peut visualiser différentes lumières, manifester différentes chaleurs ou couleurs. On associe la sensation “couleur” à un certain type de radiation électromagnétique présente dans la lumière: si la longueur d’onde est grande ( 0,7 m) nous voyons “rouge”; si elle est courte 0,4 m), nous voyons violet”. Mais la sensation rouge ou violet est la même. L’Å“il visualise la couleur uniquement en présence de lumière, et ne traduit aucune différence entre les ondes courtes ou grandes, donc la perception de la couleur s’établie ailleurs.

Où s’effectue la perception des couleurs ?

En voyant l’image (la réflexion de la lumière sur l’objet) un flux de photons frappe la rétine qui touche à l’intérieur des cellules appelées “cônes” qui renferment des pigments à trois longueurs d’ondes différentes dont le mélange permet de reproduire les différentes couleurs. Ces ondes produites vont aux synapses par des neurotransmetteurs et il y a codage et décodage, puis au cortex, et ensuite l’effet de “sensation” est produit une fraction de seconde plus tard.

Mais ce phénomène électrique du cortex qui se traduit en sensation est aussi un produit de la conscience, car si les ondes déterminent les activités physiques, chimiques et électriques, la conscience apparaît immédiatement pour maîtriser le cortex.

Par conséquence nous pouvons dire que la couleur existe grâce à la lumière d’une part (phénomène physique), mais également par l’Å“il et notre cerveau d’autre part (phénomène psychique), son cheminement se traduit par une interprétation et de ce fait nous pouvons dire que la couleur est une vue de l’esprit. Semir Zeki disait :

« Le monde que nous voyons est une invention du système visuel. »

Maintenant que nous avons défini la couleur comme étant une vue de l’esprit, conscience comme prise de conscience à travers le prisme de notre histoire personnelle et degré de sociabilité.

Cette conclusion fait apparaître deux idées forces si la couleur est interprété de manière objective par notre sensibilité, elle l’est aussi d’une manière subjective par notre degrés de sociabilité.

La couleur nous la percevons puis nous l’interprétons par le biais de notre conscience : la couleur va faire réagir notre intellect en se soustrayant à des codes, mais aussi à notre affecte qui va créer nos émotions.

La couleur est aussi un moyen d’expression, et de communication qui va faciliter la compréhension du message que veut faire passer le réalisateur.

Henri Lacour, photographe et professeur d’art plastique retraité, nous explique au cours d’une conférence sur la couleur dans l’image:

« La couleur est un composant plastique à part entière de l’image, et par sa charge symbolique et son pouvoir émotionnel, elle constitue à elle seule un véritable langage, quasiment autonome, un support médiatique très efficace et un moyen presque universel de communication. »

La couleur joue un rôle de communication presque universel, en effet ce langage ne peut être adapté au monde entier car la couleur agit sur notre intellect, on parlera de couleur symbolique. Comme l’écriture, on agit en fonction de code établi par notre société, de ce fait nous interprèteront différemment les couleurs suivant notre culture, le noir signifie la mort pour les occidentaux (couleur de deuil) alors que chez les africains c’est le blanc.

C’est un langage quasiment autonome et un support médiatique très efficace car nous sommes affecté par la couleur, malgré nos codes chromatiques nous sommes sensible à celle-ci, c’est indépendant de notre intelligence.

Par exemple les couleurs vivent peuvent nous rendre plus agressif, l’usage nous conseille d’éviter de dormir dans une chambre rouge mais plutôt dans une chambre avec des tons pastels. Mais un nouvel élément rentre en paramètre, celui de notre état d’âme, de notre expérience vécu. Tout le monde réagi à la couleur, mais différemment, il n’y a pas de code social qui nous dirige seulement notre expérience de la vie. Un événement de notre vie peut avoir influencer notre réaction à la couleur, un traumatisme, une joie extrême. Par exemple, Alfred Hitchcock illustre cette théorie dans « pas de printemps pour Marnie » afin d’expliquer la phobie de son héroïne à la couleur rouge par un traumatisme oublié de sa petite enfance.

La couleur n’est pas uniquement symbolique elle a un pouvoir émotionnel.

Nous pouvons développer cette partie, en nous appuyant sur une citation de Eugène Delacroix tiré d’un journal :

« La couleur est par excellence la partie de l’art qui détient le don magique. Alors que le sujet, la forme, la ligne s’adressent d’abord à la pensée, la couleur n’a aucun sens pour l’intelligence, mais elle a tous les pouvoirs sur la sensibilité, elle remue les sentiments. »

Pour Eugène Delacroix la couleur n’a aucun sens pour l’intelligence. Par contre les lignes, suivent une logique conceptuelle à laquelle n’obéit pas la couleur.

Roland Barthe le rejoint en affirmant, à propos du cinéma :

« La couleur c’est l’affect »

Si nous dessinons la forme d’un chat, qu’il soit colorié en bleu ou en rouge le dessin reste un chat, nuancé cela dit par les couleurs qui vont lui apporter une sensibilité. Maintenant si la forme change on ne pourra plus reconnaître un chat.

Dans cet exemple la couleur va « remuer les sentiments », jouer le rôle de stimuli émotionnel, tandis que la forme ou les lignes vont lui donner un sens rationnel.

Nous allons maintenant décrire, avec cette définition de la couleur que nous avons établi ensemble, sur des exemples propre au cinéma avec le film : pas de printemps pour Marnie d’Alfred Hitchcock et Bleu un film de Krzysztof Kieslowski. Ceci représente ma dernière partie.

Pas de printemps pour Marnie est un film de 1964. Une joile jeune femme (Marnie Edgar), menteuse et voleuse compulsive, est prise la main dans le sac par son employeur Marc Rutland. Plutot que de la remettre aux mains de la police, il préfère épouser cette femme perturbée afin de découvrir les raisons de son comportement mystérieux.

J’ai choisi la séquence dans laquelle le spectateur voit pour la première fois la phobie de Marnie pour la couleur rouge.

Marnie rend visite à sa mère. Dans le salon un bouquet de fleur rouge est entreposé. Face à cet objet Marnie dévoile sa phobie pour le rouge.

Cette phobie est mise avant par plusieurs évènements, le premier se trouve sur le découpage du plan. Nous commençons par un gros plan en « insert » du bouquet de fleur suivi d’un gros plan sur le visage en rouge de Marnie. Cette suite de plan met en relation le personnage de Marnie avec le bouquet de fleurs. De plus une musique vient tinter nos oreilles il existe bien un lien, fort en émotion, entre le personnage et le bouquet. Même si la musique prend une place importante dans notre interpellation, la couleur rouge flamboyante et exacerbée du bouquet de fleur, ne nous rend pas insensible devant l’image. Je ne pourrais pas décrire la sensation qui se dégage face à ce rouge car il est difficile de cerner l’émotion qui s’y échappe sachant qu’elle diffère suivant les personnes. Mais cela dit cette sensation existe.

Le plan qui suit renforce notre stupeur. Alfred Hitchcock utilise un filtre rouge sur un gros plan du visage de Marnie. Nous comprenons grâce à cet enchaînement de plan et par la plastique de l’image le poids que « le maître » veut donner à la couleur, un disfonctionnement dans l’esprit de Marnie face à cette couleur. Le réalisateur met le spectateur à la place du personnage de Marnie grâce à cette indication chromatique. Attention je n’enlève pas le poids de la musique qui joue un rôle très important dans la perception de la sensation.

Dans cet exemple Alfred Hitchcock utilise la couleur de manière caricaturale (qui sera amplifié par Brian De Palma).

Nous retrouverons l’emploi de la « couleur-émotion » dans d’autre film ou son emploi est plus subtil, qui sera l’objet de notre deuxième exemple : Bleu de Krzysztof Kieslowski.

« Bleu » est un élément de la trilogie trois couleur Bleu Blanc et Rouge (1993). Julie est la femme d’un compositeur de musique qui trouve la mort avec son fils au cours d’un accident de voiture. Elle va lutter pour sortir de son cauchemar et retrouver sa liberté.

Dans ce film la couleur Å“uvre pour la création d’émotions, l’héroïne est constamment reliée à son passé par des effets visuels chromatiques qui la mette psychologiquement en état suicidaire, cet état est montré aux spectateurs de façon palpable par l’intervention de la couleur bleu sous des formes variés (reflets, bains, éclairages, objets.) qui sont des indices, qui tentent de mettre le spectateur dans un état émotionnel proche de celui de l’héroïne.

Cet sensation chromatique prend une dimension supérieure lorsque son apparition est irrationnelle, parce qu’a cet instant le spectateur est convaincu qu’il s’agit d’un état d’âme. La preuve nous en est donnée par l’intervention de la musique qui est liée à la même fonction et qui agit comme renforçateur, sans que l’on sache quel part donner à chacune d’elle.

La séquence de l’escalier.

J’ai choisis une partie de cette séquence car elle est représentative de la présence irrationnelle de la couleur bleue.

Juliette ferme malencontreusement la porte de son appartement et se retrouve dans coincé dans la cage d’escalier. Observant une scène de vie de son entourage, elle plonge à nouveau dans sa solitude, son souvenir, son état d’âme.

Plan1 : caméra à l’épaule en légère contre plongée, demi-essemble.

Julie descend les marches de l’escalier et s’assoie au centre du cadre.

Plan2 : gros plan sur julie. Filmé latéralement.

La lumière s’allume une porte claque et des bruit de pas qui monte les escaliers.

Plan3 : plan légèrement en plongé qui pourrait représenter le regarde de Julie.

Une femme apparaît dans le champ, elle gratte sur la première porte puis rentre dans la seconde. Quelques instants plus tard un homme sort de la première porte et rejoint la femme dans son appartement, en jetant un regard à julie.

Plan4 : Gros plan sur Julie identique au plan2

Plan5 : plan identique au plan 3

La porte de l’appartement de la femme s’entrouvre, elle jette un regard à Julie souris, puis referme la porte.

Plan6 : Gros plan sur Julie de face. Léger panoramique de gauche vers la droite.

Julie ferme les yeux, des reflets bleus apparaît à l’écran, le réalisateur ne nous donne aucun élément pour pouvoir donner un sens rationnel à ces reflets, la musique démarre au même instant. Elle ouvre les yeux et tout s’arrête (musique et reflet). Elle les referme à nouveau, et comme cycle sans fin, ce mélange réapparaît.

Nous avons vu au cours de cette dissertation une définition de la couleur en tant que vue de l’esprit. Après l’avoir comparé à un langage presque universel nous l’avons rapproché au cinéma en citant deux exemples cinématographiques, pas de printemps pour Marnie et Bleu. Nous avons défini la couleur comme un rôle à la fois symbolique, lorsqu’elle s’adresse à notre intellect, mais aussi comme stimuli émotionnels lorsqu’elle s’adresse à notre affect. Dans le cinéma, comme dans les autres arts, la couleur a le pouvoir de rendre une Å“uvre sensible.

Bleu et pas de printemps pour Marnie font partie d’une longue liste de film utilisant la couleur comme « couleur-emotion » ce procédé a été souvent utilisé dans la comédie musicale. Je ferais un dernier point au sujet de la musique, car que ce soit le film de pas de printemps pour Marnie, Bleu ou les comédies musicales la couleur est souvent accompagnée par la musique, elle a aussi un rôle de création d’émotion qui est souvent mieux perçu.

5 Comments currently posted.

Nicolas says:

Interressant comme sujet, de même que le rapprochement des couleurs au cinéma, très sympa.

mefisto says:

Penses tu qu’il faille aussi s’intéresser au Film “Virginie” d’Orson Wells ?

eclipse says:

Sujet très interessant avec citation pour appui,sympathique!
Bravo! Cela m’a beaucoup aidé!

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